L’inceste désigne les violences sexuelles commises au sein de la famille sur un mineur par un de ses proches (parent, frère ou sœur, oncle, tante, grand-parent, etc.).
Longtemps tabou, l’inceste est aujourd’hui mieux pris en compte par la loi et la société. Il ne constitue pas une infraction pénale autonome intitulée “inceste”, mais vient aggraver les crimes et délits sexuels (viol, agression sexuelle, atteinte sexuelle) lorsqu’ils sont commis par un membre de la famille sur un mineur.
Voici 5 questions-réponses pour comprendre vos droits si vous ou votre enfant êtes victime d’inceste, et les démarches à entreprendre.
1. Quels actes sont considérés comme de l’inceste ?
On parle d’inceste dès lors qu’un acte sexuel est imposé à un mineur par un membre de sa famille proche, par exemple : un parent sur son enfant, un grand-parent sur son petit-enfant, un frère sur sa sœur, un oncle sur son neveu/nièce, etc. La loi inclut également les conjoints/concubins des membres de la famille (beau-père, belle-mère) s’ils ont autorité de fait ou de droit sur le mineur.
Les actes incestueux peuvent prendre la forme de viol (pénétration sexuelle imposée) ou d’agressions sexuelles (attouchements, caresses sexuelles sans pénétration) commis sans consentement. Attention : depuis la loi du 21 avril 2021, tout acte sexuel d’un majeur sur un mineur de moins de 15 ans est automatiquement considéré comme non consenti (viol ou agression sexuelle sur mineur).
Et en cas d’inceste, ce seuil est porté à 18 ans : autrement dit, un adulte de la famille n’a pas le droit d’avoir de relations sexuelles avec un mineur de moins de 18 ans de sa famille, même si celui-ci était soi-disant “consentant”. Le lien familial crée une emprise et une inégalité qui vicient le consentement.
L’inceste peut également être psychologique (sans contact physique direct) : par exemple un parent qui impose à l’enfant de regarder des actes sexuels, de poser nu, etc., est dans une forme d’incestualité.
2. Quelles sont les peines encourues en cas d’inceste ?
Les peines dépendent de la nature de l’acte commis :
- Viol incestueux sur mineur (pénétration sexuelle) : crime puni de 20 ans de réclusion criminelle (peine plancher, pouvant aller jusqu’à 30 ans en cas de circonstances aggravantes graves).
- Agression sexuelle incestueuse sur mineur (attouchements, baisers forcés, etc., sans pénétration) : délit puni de 10 ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende (cette peine peut être portée à 15 ans si la victime a moins de 15 ans ou en cas de circonstances aggravantes).
Ces peines sont plus lourdes que pour des violences sexuelles “non incestueuses” car le législateur considère la trahison du lien familial comme un facteur aggravant extrêmement grave.
Par ailleurs, le retrait total ou partiel de l’autorité parentale de l’auteur incestueux peut être prononcé. En effet, si le coupable est le père ou la mère, le tribunal doit se pencher sur la question de lui retirer l’autorité parentale pour protéger la victime et ses éventuels frères et sœurs.
Tableau récapitulatif des peines (hors circonstances aggravantes spéciales) :
Infraction sexuelle incestueuse (victime mineure) | Peine principale encourue |
---|---|
Viol (pénétration) | 20 ans de réclusion criminelle |
Agression sexuelle (hors pénétration) | 10 ans de prison et 150 000 € d’amende |
Atteinte sexuelle (relation “consentie” avec mineur de plus de 15 ans par un ascendant ou autorité – cas rarissimes) | 7 ans de prison et 100 000 € d’amende (pouvant être requalifiés selon contexte) |
NB : Les atteintes sexuelles incestueuses sur mineur de moins de 15 ans n’existent pas juridiquement car tout acte est requalifié en agression sexuelle voire en viol du fait de l’absence de consentement légal.
3. Comment porter plainte et dans quel délai ?
Porter plainte pour des faits d’inceste se fait comme pour toute agression sexuelle : rendez-vous dans un commissariat/gendarmerie ou écrivez directement au Procureur de la République.
Le témoignage de la victime est la pièce centrale de la procédure. Il est conseillé de se faire accompagner d’un avocat pénaliste dès le dépôt de plainte afin que celui-ci vous aide à formuler précisément les faits et à signaler le lien de parenté avec l’agresseur (pour que l’aspect incestueux soit pris en compte).
En France, le délai de prescription des crimes sexuels sur mineur (viol, agressions sexuelles aggravées) est de 30 ans à compter de la majorité de la victime. Cela signifie qu’une victime mineure au moment des faits peut porter plainte jusqu’à ses 48 ans. Pour les délits sexuels sur mineur (atteinte sexuelle sans violence par exemple), la prescription est de 20 ans après la majorité (soit jusqu’aux 38 ans de la victime).
Ces délais longs tiennent compte du fait que la parole des victimes d’inceste se libère souvent tardivement, à l’âge adulte, lorsque la victime parvient à surmonter le déni ou les menaces. À noter que si plusieurs victimes se manifestent ou si des éléments nouveaux apparaissent, une affaire même ancienne peut être rouverte.
En cas de doute sur la prescription, consultez un avocat qui analysera la situation précise (les lois récentes allongeant la prescription s’appliquent de façon rétroactive sous conditions).
4. Quelle protection pour la victime pendant la procédure ?
Les procédures judiciaires d’inceste sont lourdes, mais des mesures existent pour protéger et accompagner la victime :
- Juge des enfants et placement : Si l’auteur est un parent ou vit avec la victime, le juge des enfants peut ordonner le retrait de l’enfant du domicile (placement en famille d’accueil) ou l’éviction de l’auteur, dès le stade de l’enquête, pour mettre le mineur en sécurité.
- Assistance d’un avocat : Le mineur victime peut être représenté par un administrateur ad hoc et un avocat dès le début de la procédure. Les frais d’avocat peuvent être pris en charge par l’aide juridictionnelle, souvent de droit dans ce type d’affaires.
- Audition filmée : La victime mineure sera auditionnée par la police ou un juge dans des conditions adaptées (locaux spécialisés, psychologue présent) et l’entretien sera enregistré sur vidéo pour éviter les répétitions traumatisantes.
- Interdiction de contact : Des mesures de contrôle judiciaire ou de détention provisoire peuvent interdire formellement à l’auteur présumé d’entrer en contact avec la victime et les témoins pendant toute l’instruction.
- Victime partie civile : En vous constituant partie civile, vous obtiendrez un statut dans la procédure, permettant d’être informé(e) des avancées, de demander des actes d’enquête via votre avocat et plus tard de réclamer des dommages-intérêts.
Par ailleurs, des dispositifs d’aide existent hors du judiciaire : suivi psychologique gratuit par des associations (ex : Centres du psychotrauma), groupes de parole spécialisés (Face à l’Inceste, etc.), numéros d’écoute (119 – Allô Enfance en Danger ou le 3018 pour les mineurs).
La prise en charge du traumatisme est essentielle, car l’inceste cause des blessures psychiques profondes (stress post-traumatique, troubles de l’attachement, etc.).
L’aspect judiciaire, bien que nécessaire pour rendre justice, doit s’accompagner d’un soutien global de la victime vers la résilience.
5. Quelles conséquences pour l’auteur en cas de condamnation ?
Si l’auteur des faits est reconnu coupable par la cour d’assises (pour un crime) ou le tribunal correctionnel (pour un délit incestueux) :
- Peine de prison ferme : compte tenu de la gravité, les peines planchers sont élevées (voir point 2). L’auteur sera souvent incarcéré pour de nombreuses années.
- Inscription au Fichier des Délinquants Sexuels (FIJAIS) : pour suivre sa situation après sa sortie.
- Suivi socio-judiciaire : le condamné peut être astreint à un suivi thérapeutique obligatoire après sa peine, et à une interdiction d’entrer en contact avec la victime ou de paraître dans certains lieux (écoles, etc.).
- Retrait de l’autorité parentale : s’il était titulaire de l’autorité parentale sur la victime ou d’autres enfants mineurs, le juge pénal doit se prononcer sur le retrait de cette autorité. Dans de nombreux cas, le parent incestueux perd donc légalement ses droits parentaux afin de protéger les enfants.
- Dommages-intérêts : le coupable devra verser à la victime des indemnités pour réparer le préjudice subi (préjudice moral très important, frais thérapeutiques, perte de chance, etc.). Si l’auteur est insolvable ou inconnu, la victime pourra solliciter la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions (CIVI) pour être indemnisée.
Important : Le silence autour de l’inceste est un terreau qui favorise sa répétition d’une génération à l’autre.
En osant parler et en engageant des poursuites, la victime non seulement se protège elle-même, mais protège potentiellement d’autres enfants de la famille.
- Depuis quelques années, la société française encourage cette libération de la parole (mouvement #MeTooInceste).
- Les professionnels (éducateurs, médecins…) ont obligation de signaler aux autorités toute suspicion d’inceste sur un mineur.
L’inceste est un crime ou un délit sexuel aggravé, qui choque particulièrement la conscience.
La loi française, renforcée en 2021, punit très sévèrement ces actes (jusqu’à 20 ans ou plus de prison) et offre aux victimes un cadre pour parler même des années après.
Si vous êtes victime d’inceste, vous n’êtes pas seul(e) : des avocats, des associations et des professionnels sont là pour vous écouter, vous croire et vous aider à obtenir justice.
Le cabinet de Maître Chreifa Badji Ouali s’est engagé dans la défense des victimes de violences intrafamiliales et saura vous accompagner avec humanité et détermination vers la reconnaissance de votre statut de victime et la condamnation de votre agresseur.
📌 Contact utile : Association Face à l’Inceste – plateforme d’aide aux victimes et proches (site web, groupes de parole). Numéro national Enfance en Danger 119 pour signaler tout enfant en danger immédiat.